Redoutée par les employeurs, mal comprise par ceux qui en subissent les conséquences, la grève est un droit fondamental des salariés pour faire valoir leur mécontentement, reconnu par la Constitution depuis 1946.
Les différentes grèves en France sont encadrées par des règles très précises, aussi bien pour les employeurs que pour les grévistes et les salariés non-grévistes.
Dans cet article, nous allons faire un tour d’horizon sur le droit de grève, parler de la gestion de la grève dans l’entreprise, comment faire valoir une grève et agir en tant qu’employeur, et tous les enjeux que le droit de grève suppose pour l’employé et l’employeur.
Qu’est-ce que la grève ?
Le service public la définit très bien. « La grève est définie comme étant la cessation collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles ».
C’est un droit individuel exercé de manière collective puisqu’il y a grève seulement si au moins deux salariés y participent.
Exception faite, quand une entreprise compte qu’un seul salarié.
Qui a le droit de faire la grève ?
Le droit de grève en France est une liberté garantie par la loi à tout salarié, du secteur public ou privé, en respectant les conditions définies par la législation.
Si aucun employeur ne peut s’opposer au droit de grève, il existe cependant des exceptions dans le Code du travail. Certaines catégories socioprofessionnelles doivent respecter des procédures pour garantir le bon fonctionnement du pays :
Policiers, militaires, magistrats…
Personnel hospitalier
Secteur de l’audiovisuel
Secteur des transports
Secteur énergétique
Quelles sont les conditions de validité d’une grève ?
Dans le secteur privé, une grève du travail peut être lancée par les salariés. Par contre, dans le secteur public, elle est obligatoirement déclenchée à l’appel d’un syndicat.
De surcroît, 3 conditions doivent être réunies pour qu’une grève soit valide :
Le travail doit cesser complètement : si l’on continue à travailler, même de manière moins efficace, il ne s’agit pas d’une grève.
Il doit s’agir d’un mouvement collectif, même si pas nécessairement majoritaire. Faire la grève seul n’est pas une grève, mais un refus de travail (sauf dans le cas d’un mouvement national).
Les grévistes doivent avoir des revendications professionnelles (salaire, conditions de travail ou autres : il n’est pas possible de faire la grève contre la hausse des prix ou le port du masque.
Si la plupart des salariés du secteur privé peuvent se mettre en grève sans aucune formalité, les secteurs du transport [terrestre ou aérien] sont soumis à des règles particulières :
Obligation de négociation préalable
Obligation de préavis de 48 h minimum
Quelles sont les limites au droit de grève ?
Le Code du travail est clair. Les limites du droit de grève sont marquées par les conditions de validité énoncées plus haute. Une grève est donc déclarée illicite si TOUTES ces conditions ne sont pas remplies.
Dans le cas d’un mouvement social illicite, les salariés en cause sont coupables d’une faute professionnelle qui peut être sanctionnée par l’employeur.
Abus du droit de grève
Même lorsque les conditions de validité sont réunies, des abus peuvent être commis qui mènent les juges à déclarer le mouvement illicite.
Comme exemple d’abus, on peut citer notamment le non-respect du droit au travail des salariés non grévistes, ainsi que la désorganisation volontaire de l’entreprise.
Quel est le préavis de grève à respecter dans le privé ?
Contrairement à ce que pensent de nombreuses personnes, les salariés du secteur privé n’ont aucun préavis de grève à respecter, hormis ceux travaillant dans un secteur soumis à des restrictions particulières du droit de grève en France.
Toutefois, les salariés grévistes ont l’obligation de transmettre à l’employeur les revendications qui motivent le mouvement social, sans quoi celui-ci peut être déclaré illicite.
Quelles sont les revendications professionnelles ?
À quoi sert la grève ? La cessation du travail intervient dans le cadre de revendications professionnelles comme :
Le salaire,
Les conditions de travail (par exemple, la sécurité sur les lieux de travail, etc.),
La défense de l’emploi,
Les droits syndicaux.
Comment gérer une grève dans l’entreprise en tant qu’employeur ?
La communication est essentielle en cas de mouvement social. L’employeur doit donc ouvrir les discussions avec les salariés grévistes pour résoudre au mieux le conflit.
À NOTER : Si l’existence de revendications professionnelles est une condition sine qua non de la validité d’une grève, seuls les salariés grévistes sont juges de la légitimité de ces dernières.
Quelles actions l’employeur peut-il envisager en cas de grève ?
Lors d’une grève, l’employeur a lui aussi des droits et des obligations.
Ce que l’employeur ne peut pas faire
L’entreprise ne peut en aucun cas interdire, encadrer ou limiter le droit de grève par une convention collective. Seule la loi peut s’appliquer, même dans les secteurs spécifiques.
L’entreprise doit respecter la protection des employés en grève en garantissant l’égalité de traitement :
Aucune discrimination ne peut être faite, notamment en matière de salaire
Aucune sanction ne peut être appliquée, sauf en cas de mouvement abusif ou de faute lourde
Ce que l’employeur peut faire
Le droit de grève en France entraîne une suspension temporaire du contrat de travail pendant la durée du mouvement social. En conséquence, l’employeur peut mettre en place une retenue sur salaire proportionnelle.
À NOTER : Le motif de cette retenue ne doit pas apparaître explicitement sur la fiche de paie, mais être remplacé par un terme neutre [« absence sans rémunération » ou autre]
En cas de dégradations, de violences, ou de séquestrations, qui sont des actes totalement illégaux et sanctionnables, non couverts par le droit de grève garanti par le code du travail, l’employeur est autorisé à demander réparation.
Comment remplacer des grévistes ?
Un salarié gréviste ne peut en aucun cas être remplacé par un salarié en contrat temporaire (intérim ou CDD). Vous pouvez par contre faire appel à un salarié temporaire en période de grève. Cependant, le motif de remplacement ne peut être une substitution à un salarié gréviste.
Grève : rémunération et retenue sur salaire ?
Quelles sont les conséquences de la grève pour le salarié et l’entreprise ? On distingue trois cas :
Salarié gréviste : son contrat de travail est suspendu, et l’entreprise n’est pas obligée de le payer pour les heures non travaillées.
Salarié non gréviste ne pouvant travailler pour motifs liés à la grève : l’entreprise peut proposer au salarié une retenue sur salaire proportionnelle, une récupération des heures non travaillées, ou des jours de congé.
Salarié non gréviste pouvant travailler : que ce soit en présentiel ou en télétravail, un salarié exerçant ses fonctions habituelles doit être payé normalement.
BON À SAVOIR : La retenue sur salaire doit correspondre aux heures non travaillées : toute retenue additionnelle est considérée comme discriminatoire et donc prohibée.
En revanche, la suppression des primes liées à la présence du salarié [prime d’assiduité, de productivité…] est parfaitement légale, à condition qu’une absence pour autre motif [maladie…] entraîne elle aussi la perte de cette prime.
Le salarié gréviste peut-il être licencié ?
L’employeur ne peut pas licencier son salarié pour le motif de participation à une grève. Par contre, s’il commet une faute grave, le licenciement peut être justifiée.
En résumé
Le droit de grève est possible sous 3 conditions : cesser de travailler complètement, mobiliser un mouvement collectif non individuel, déclarer des revendications professionnelles
Tout salarié a le droit de faire grève sauf exceptions
L’employeur ne peut en aucun cas l’interdire
Le contrat de travail est suspendu temporairement
Il peut y a voir une retenue sur salaire
La gestion d’une grève est déjà bien compliquée, celle des absences n’a pas à l’être aussi.
source : factorial.fr 9 mars 2022
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